Brice Lepoutre, président de l’AIDUCE, réagit au rapport de l’OMS dans LeMonde.fr, Pour lui, “une interdiction d’utiliser l’e-cigarette dans les lieux publics reviendrait à la « diaboliser » ”.
27/8/2014, Laetitia Clavreul et Faïza Zerouala, LeMonde.fr
Que fera la France de cette prise de position ? L’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’est prononcée, mardi 26 août, en faveur de l’interdiction de la vente de cigarettes électroniques aux mineurs et de leur utilisation dans les lieux publics fermés, “jusqu’à ce qu’il soit prouvé que la vapeur exhalée n’est pas nocive pour les tiers”, ont précisé les experts. Si, depuis mars 2014, la vente est déjà proscrite aux moins de 18 ans en France, la question du vapotage dans les lieux publics, elle, embarrasse le gouvernement. Et fait débat plus largement.
La position de l’OMS va dans le sens de ce que prône le ministère de la santé. Il y a plus d’un an déjà, Marisol Touraine s’était dite favorable à une interdiction dans les lieux publics, tout en reconnaissant l’intérêt de l’e-cigarette pour le sevrage. Depuis, rien n’a bougé. La ministre est toujours favorable à une interdiction “dans certains lieux publics”, comme elle l’a redit en avril. La mesure devait être inscrite dans la future loi de santé, prévue pour 2015.
“C’est le flou complet”, estime le professeur Bertrand Dautzenberg, pneumologue, président de l’association Office français de prévention du tabagisme (OFTA) et favorable à l’interdiction.
FREINS POLITIQUE, JURIDIQUE ET SCIENTIFIQUE
Pour lui, le motif d’interdiction de la cigarette électronique dans les lieux publics ne repose cependant pas sur une considération sanitaire, car “le produit ne rejette pas de monoxyde de carbone ou de particules solides nocives”, mais sur “un choix de société qui consiste à éviter tout effet incitatif”.
La décision finale du gouvernement devrait figurer dans le plan national de réduction du tabac demandé par François Hollande. Annoncé dans un premier temps pour juillet, il est désormais programmé “pour la rentrée”. L’interdiction de vapoter dans les lieux publics est un des points qui resteraient à trancher par l’Elysée, prudent sur la question.
Prendre position est difficile à plusieurs titres. Scientifique, car qu’il n’y a pas consensus sur la nocivité ou non de l’e-cigarette. Politique, car de plus en plus de Français sont passés au vapotage – il y a 1,5 million d’utilisateurs quotidiens d’après l’Observatoire français des drogues et toxicomanies – et parce qu’il s’agit d’un outil de sevrage efficace. Le frein est juridique aussi : appliquer purement et simplement la législation en vigueur pour le tabac ne semble pas possible, les produits étant différents.
“CROISADE HYGIÉNISTE”
Pour l’heure, dans les écoles, cafés, restaurants, hôpitaux, aéroports ou gares, chacun fait ce qu’il veut. Des règlements ont été édictés au cas par cas, selon les besoins. Ainsi, dans la restauration, rien n’a été fermement tranché. “Tant que les scientifiques n’établissent pas la nocivité de la cigarette électronique, on ne l’interdit pas”, explique Marcel Benezet, président du Synhorcat, le syndicat des cafés, bars, brasseries. En revanche, si les risques de “tabagisme passif” étaient avérés, il assure que son syndicat “soutiendrait et accompagnerait le gouvernement” pour interdire de vapoter dans les lieux confinés.
De son côté, Brice Lepoutre, président de l’Aiduce, l’association indépendante des utilisateurs de cigarette électronique, s’élève contre le rapport de l’OMS. Il est aussi circonspect quant à la pertinence de légiférer : “Il n’y a aucune preuve de la dangerosité de la « vape ». On n’a pas besoin d’une loi pour les lieux publics. Tout repose sur le bon sens. Un prof ne va pas vapoter devant ses élèves, par exemple. On a le sentiment que le ministère de la santé veut mener une croisade hygiéniste ! ” Pour lui, une interdiction d’utiliser l’e-cigarette dans les lieux publics reviendrait à la “diaboliser”.
A la Fivape, le syndicat des fabricants, on est favorable à la concertation. Rémi Parola, le coordinateur, préférerait “une interdiction au cas par cas, pas une interdiction brutale qui pourrait participer à la méconnaissance de la cigarette électronique. Cela peut dissuader des gens d’opter pour elle et de cesser de fumer”. Réponse sous peu.
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